C’est vers les quinze ans que j’ai commencé à répertorier scrupuleusement les méthodes de drague et de séduction qui me paraissaient – empiriquement – les plus efficaces, dans l’optique de pondre un « guide de la drague ». Sauf erreur ou omission, j’ai lu et étudié l’ensemble des livres qui traitent du sujet. Parfois, même les articles les plus anodins sur la question m’apprennent une nouvelle astuce. J’ai également dévoré et appris des dizaines de bouquins sur les méthodes de communication des publicitaires, des commerciaux, des journalistes et des hommes politiques.

J’ai réuni l’ensemble de ces données, je les ai classées, épurées, tout en veillant à garder un ton humoristique, histoire de toucher le plus large public ce qui, je pensais, augmenterait mes chances d’être publié. Ce léger travail m’a pris trois ans. Trois ans à craindre que si je n’étais pas édité, j’étais en train de bucher pour des neffles … Quand mon manuscrit fut prêt, j’en ai fait imprimer dix exemplaires que j’ai envoyés aux maisons d’éditions qui avait l’habitude de publier des livres marrants. Je ne me suis trompé que pour un seul envoie : j’ai adressé mon manuscrit à « Dreamland, une maison d’édition qui n’avait rien à voir avec la choucroute, puisqu’elle était spécialisée dans le cinéma… Je n’avais donc strictement aucune chance que Dreamland soit intéressé par mon humour corrosif… Et pourtant, trois semaines plus tard, c’est cette édition qui m’a contacté : ils trouvaient mon bouquin marrant et pédagogique : ils acceptait de l’éditer ! J’ai pris rendez vous avec l’éditeur et, le jour J, je suis arrivé dans la maison d’édition avec un stylo à la main en disant, le sourire aux lèvres: « Je signe où ? ». Le soir, avec mon contrat et Jean-David, j’ai fété le moment « historique », en buvant un champagne banal, qui m’a apparu beaucoup plus savoureux qu’à son habitude…

Il restait à trouver celui qui dessinerait la couverture. Après plusieurs appels, je suis parvenu à contacter l’illustre Wolinski. Je m’étais entendu avec Dreamland pour lui offrir dix mille euros contre un petit graffiti… J’avais l’impression de le déranger en pleine sieste, car il m’a répondu en baillant que bof, il avait trop de boulot pour s’en occuper… Je me suis alors tourné vers Philippe Vuillemin, le célèbre dessinateur de l’Echo des Savanes, mais cette fois, par prudence, je ne lui ai pas parlé d’argent. Il a accepté, et m’a demandé seulement mille euros ! Il a envoyé trois essais à mon éditeur, dont deux étaient, j’imagine volontairement, carrément grotesques. Par contre le troisième dessin était génial. Mon livre, qui devait s’intituler Drague et Séduction prenait forme… J’ai utilisé le même dessin pour la couverture pour mon deuxième livre, Comment draguer la femme de sa vie. On ne change pas une équipe qui gagne…

Drague et Séduction est paru dans les Fnac, les Virgin et les librairies quelques mois plus tard. La première fois que je l’ai aperçu en rayon, je n’ai pas pu résister au geste un peu candide, de le prendre en photo.

Dreamland fit faillite quelques mois plus tard, suite à la mise en cessation de paiement de sa maison de distribution Vilo… Du coup, malgré les vingt-mille exemplaires vendus, un chiffre qui le plaçait au rang de « best-seller » , je n’ai pas gagné un rond. Rien à foutre, d’une part parce que malgré les convictions de Freud, je n’ai jamais couru après l’argent quand il n’est pas indispensable, et d’autre part, parce que la parution de ce livre m’a donné de la crédibilité dans mon travail de coach, ce qui m’a conduit à passer pas mal de fois à la télé, à écrire un deuxième film, un autre livre, et aussi, ben… à rédiger le bouquin que vous tenez dans vos mains…