C’est Michel Lecomte, PDG de la société Arcadès qui, intéressé par le succès de mon premier livre Drague et séduction, m’a proposé d’écrire le DVD L’art de la séduction, comment aborder une femme. Je me suis exécuté avec plaisir, notamment parce que je n’ai pas fait qu’écrire le scénario, mais je me suis également chargé du casting en m’attribuant au passage le rôle… du coach en séduction…
Pour le casting, j’ai trouvé les comédiennes dans la rue. Le processus était d’une simplicité enfantine, et m’a même permis d’en déduire une technique de drague que j’ai appelée : « le court métrage ». On s’approche d’une jolie inconnue pour lui dire : « Bonjour mademoiselle. Mes amis et moi sommes sur le point de réaliser un court métrage, et vous êtes peut être la comédienne qu’il nous faut ! Ça vous diraitde rigoler en équipe devant une caméra ? Vous verrez, l’ambiance est excellente. ». Bien souvent, la fille en question donne son numéro par curiosité, histoire de lire le synopsis. Ensuite le séducteur lui donne rendez vous devant une coupe de champagne, et fait lire à la fille quelques lignes d’une histoire marrante qui pourrait être la base du court métrage en question. Ensuite, soit il annule le tournage parce qu’il a cassé la caméra, ou que le scénario a été détruit dans un dégât des eaux, qu’importe, soit il réalise effectivement quelques scènes avec des copains et une caméra quelconque…
Dans mon cas, il n’y avait pas besoin de fabuler… Et les jolies créatures que je croisais avec mon scénario sous le bras étaient en général ravies de participer à l’aventure. Avec le réalisateur, on leur donnait rendez vous dans mon bureau, et on choisissait celles qui récitaient leur texte avec le plus de sincérité. Ben oui, ça s’appelle un casting… En ce qui concerne le rôle principal, celui du dragueur, le problème a été beaucoup plus délicat. Il nous fallait un vrai pro car il y avait pas mal de texte. Le seul agent de comédien qui a accepté de travailler avec nous, compte tenu de notre très mince budget, a évité de nous envoyer Alain Delon… Les comédiens devaient réciter devant la caméra le texte suivant : « Ah bon ? Tu aimes Pink Floyd ? Ca c’est marrant, c’est mon groupe préféré ! ». Cette phrase n’a, l’air de rien, mais pour la prononcer de manière naturelle, il faut s’accrocher. On a enregistré au moins vingt candidats en pure perte. Heureusement, un d’entre eux nous a aimablement conseillé de contacter un de ses amis qui était, d’après ses dires, un « dragueur naturel », et surtout, un ancien élève d’une école de cinéma. En désespoir de cause, nous avons fait passer le casting à ce dragueur le lendemain. Il a récité la satanée phrase de manière impeccable, nous avions trouvé notre premier rôle…
Puis, il y a eu le tournage lui-même, avec ses contingences. Par exemple, nous devions tourner dans un parc, et le jour J, il s’est mis à pleuvoir, ce que les caméras, les projecteurs et les techniciens n’ont pas vraiment apprécié. Il y a eu également es comédiens qui oubliaient leur texte… Il y a eu le bar, qui, au dernier moment, refusaientt que l’on tourne chez eux… Il y a eu le réalisateur qui a fait supprimer toutes les scènes marrantes, persuadé qu’il fallait faire une vidéo sérieuse… Je persiste à penser que, puisqu’il est entendu que la séduction est un domaine beaucoup trop vaste pour permettre des généralités pertinentes, il faut se rabattre, à défaut de pédagogie efficace, sur autre chose, comme l’humour. Mes éditeurs ou mes rédacteurs en chef l’ont compris et n’ont, bien entendu, jamais supprimés mon humour acerbe, mais je ne suis pas parvenu à imposer dans mon film. Scrogneugneu.
Quand le film est sortit, j’ai trouvé une deuxième raison majeures d’employer l’humour dans tout support qui se voudrait pédagogique au sujet de la séduction. En effet, je suis allez à la FNAC pour voir si mon film était bien référencé, c’est-à-dire s’il était présenté en tête de gondole ou pas. Comme il y avait des milliers de DVD, j’ai demandé à une charmante vendeuse :
– « Bonjour mademoiselle, je cherche le DVD euh… « Comment aborder une femme », de… de Patrick Harris… » La fille m’a dit avec un sourire entendu :
– « Suivez-moi, c’est par là… ». Et je me suis alors entendu me justifier, alors que je suis le contraire d’un timide, en disant : « Euh… c’est parce que c’est moi qui l’ai écrit !! » Elle m’a répondue : « oui, bien sûr, bien sûr, c’est par ici»…
J’ai alors compris qu’il est difficile, voire impossible, à un célibataire de se renseigner au sujet d’un livre ou d’un film qui est censé lui apprendre à séduire… Si un livre sur la séduction est essentiellement humoristique, cela permet au célibataire de demander ce bouquin sans avoir l’impression de passer pour un con… Je dis bien « l’impression », car en réalité, je constate que ceux qui acceptent de remettre en question leur pouvoir de séduction sont justement moins con que les autres ! Mais quoi qu’il en soit, tous les livres qui parlent de séduction devraient donc sortir avec un sublime alibi : « le prix de l’humour ! »